mercredi, août 13, 2008

13 août 2008

-70 kg : Gévrise Emane s’incline au premier tour contre l’Espagnole Leire Iglesias et n’est pas repêchée / La Japonaise Ueno bat en finale la Cubaine Hernandez
-90 kg : Matthieu Dafreville réussit l’exploit de se hisser en demi-finale, mais finit seulement cinquième / Le Géorgien Tsirekidze gagne la finale contre l’Algérien Benikhlef


-70 kg : Douche froide

Trois ans qu’elle domine le judo mondial et elle échoue au premier tour des Jeux… Comme elle le dit elle-même : « ça fait mal à la face ». Gévrise Emane n’aura pourtant pas démérité face à la dangereuse Espagnole Leire, gauchère latéralisée qui attaque peu, à part sur de beaux o-uchi-gari, mais met beaucoup de pression. Elle fit ce qu’elle a l’habitude de faire, déstabilisant son adversaire par ses saisies de jambe, ses attaques en sode-tsuri-komi-goshi. La sanction infligée par l’arbitre égyptien Rashwan, à deux secondes de la fin (!) pour saisie prolongée à la jambe fut sévère. Sans doute… mais on ne sentit pas la Française vraiment dominante, intimidante pour son adversaire. Elle lançait ses attaques, mais sans un vrai désir de marquer, de faire basculer le combat. À deux secondes de la fin, tout était encore à faire. Ce fut l’arbitre qui s’en chargea.
Au tour suivant, l’Espagnole perdait par ippon devant l’Allemande Boehm, un « engin » médaillé mondial et olympique. Depuis 2005 en championnats officiels – soit trois championnats d’Europe et deux championnats du monde – la Française n’avait perdu que deux combats. Cette troisième défaite la condamne à rentrer bredouille de Pékin. Morne voyage de retour…
EMANE BATTUE AU PREMIER TOUR PAR L'ESPAGNOLE IGLESIAS

-70 kg : Ueno, vraiment de retour !
Celui de Masae Ueno sera plus serein. Championne du monde 2001 et 2003, championne olympique en titre, la Japonaise avait arrêté la compétition, pratiquement depuis ce premier titre olympique, passant comme une ombre aux championnats du monde 2005 pour lesquels on l’avait fortement poussé à s’engager. Elle est revenue doucement cet hiver en pompier de service dans cette catégorie sans pointure nippone, ne finissant encore que troisième au tournoi de Paris. Mais elle fut à l’heure au rendez-vous. Lucide et concentrée, sûre d’elle, elle administra sa potion magique à toutes ses adversaires : Attaques debout en techniques de jambe, ko-soto-gari, o-uchi-gari, uchi-mata, suivies par d’implacables passages au sol. Elle prit ainsi les meilleures Asiatiques, la Coréenne Park (yuko sur ko-soto-gari et ippon en osae-komi) et la Chinoise Wang (ippon sur uchi-mata), les meilleures Européennes, la Hongroise Meszaros (waza-ari sur o-uchi-gari et dégagement de jambe) et la Néerlandaise Bosch (yuko sur uchi-mata en contre de kushiki-daoshi), la meilleure des Amériques (exceptée l’Américaine Ronda Rousey, contrée par Bosch), la Cubaine Hernandez (ippon sur… pelleteuse !), emportant un titre que personne ne put lui contester. Encore un doublé chez les Japonaises et des plus mérités. Ueno la discrète entre au panthéon des plus grandes. Chapeau.

-90 kg : Une incroyable opportunité

Avec son palmarès vierge, Matthieu Dafreville n’était guère attendu, d’autant que son tableau lui prévoyait du solide dès le 2e tour avec l’Italien Meloni, troisième à Rio en battant le Français, et surtout, en cas de victoire, le vainqueur d’un quart épouvantable contenant le champion olympique grec Iliadis, le champion d’Europe Huizinga, le médaillé mondial Aschwanden et les excellents combattants allemand, Pinske, et espagnol, Alarza. Et on allait de surprise en surprise : Huizinga mettait uchi-mata à Iliadis, mais se faisait contrer deux fois très joliment en uchi-mata-gaeshi par Aschwanden, vainqueur de l’Allemand. Au tour suivant, le Suisse… s’inclinait d’un shido devant l’Algérien Benikhlef, déjà vainqueur de l’Espagnol ! De son côté, Dafreville jouait les outsiders dans un tableau plus simple à gérer : sumi-gaeshi sur le Cubain Gonzales, puis sur l’Italien Meloni, une jolie performance, et encore un sumi-gaeshi sur le dangereux Brésilien Santos, au bout d’un combat intense. Il était en demi, et face à un Algérien ! Et si cette chance ne suffisait pas, il en aurait une seconde très intéressante avec l’Egyptien Mesbah pour la place de trois ! Car de l’autre côté, sans grande conviction, le champion du monde avait battu l’Egyptien Mesbah, l’Azéri Mammadov et le Russe Pershin pour se hisser en finale, et c’était l’Egyptien qui avait remonté seul la pente. Les « Jeux méditerranéens » en somme pour Matthieu en conclusion de sa première aventure olympique, une chance énorme d’aller en finale et d’y retrouver un Géorgien guère concentré, face auquel il s’était montré assez à l’aise aux championnats d’Europe… Ce fut sans doute trop pour ce jeune compétiteur. Il s’éclipsa, sans s’en rendre compte. Confronté au gaucher Algérien puissant et survolté, il ne fut pas en mesure de s’opposer et prit un kata-guruma qu’on sentait venir. En place de trois, c’est un te-guruma superbe qui mettait fin à tous ses espoirs. Dur, vraiment dur pour le Français adepte des sumi-gaeshi (des limites en expérience, mais aussi techniques qui furent exploitées par ses adversaires) qui avait là sans doute une chance unique de prendre la médaille et peut-être le titre qui change une vie. Il n’est pas dit qu’elle se représente de sitôt.
DAFREVILLE BATTU PAR L'ALGÉRIEN BENIKHLEF EN DEMI-FINALE...


...PUIS PAR L'EGYPTIEN MESBAH POUR LE BRONZE


-90 kg : Tsirekidze, malgré lui
À aucun moment poussé dans ses retranchements et confronté à ses limites évidentes, en ses périodes difficiles pour la Géorgie en guerre, le champion du monde Tsirekidze, peu concentré, peu inspiré en attaque, domina difficilement l’Egyptien (vainqueur du Coréen Choi), un Azéri à sa main et le Russe Pershin trop limité. Le Japonais Izumi, l’ombre de lui-même et semble-t-il (d’après le staff japonais) très mal descendu au poids, avait perdu au 2e tour devant le Biélorusse Kazusenok sur pelleteuse (sukui-nage). En finale, l’Algérien se montra timide et prit très tôt une pénalité sévère. Il fit ensuite jeu égal avec le Géorgien et aurait pu revenir aux pénalités, et même marqué sur une action forte. Un Algérien champion olympique de judo, cela aurait été beau. Pour la Géorgie, c’est la deuxième fois.
Les temps changent.