lundi, août 11, 2008

11 août 2008

-57 kg : Barbara Harel bat Kye Sun Hui (PKR) et Yvonne Boenisch (GER), mais finit seulement 5e / l’Italienne Quintavalle bat la Néerlandaise Gravenstijn en finale
-73 kg : L’Azéri Elnur Mammaldi prend sa revanche de Rio en battant en finale le champion du monde coréen blessé Wang Ki-Chun


-57 kg : La folle journée !

C’était réglé, c’était plié. Ce n’était même pas la peine de venir – ce que d’ailleurs pas mal de journalistes avaient fait, privilégiant les autres sites sportifs a-priori plus prometteurs sur le plan des médailles françaises. Avec un tirage pareil, Barbara Harel n’avait aucune chance, mais alors aucune, de monter sur un podium aujourd’hui. Elle devait en effet prendre pour son premier combat la gagnante d’un duel entre les deux meilleures du monde au vu des résultats récents : l’Autrichienne Filzmoser, championne d’Europe, et la Coréenne du Nord Kye. En cas improbable de victoire, c’est la championne olympique qui l’attendait : l’Allemande Boenisch. Enfin dans l’hypothèse d’une arrivée en demi-finale, la très copieuse Cubaine Lupetey, ancienne championne du monde, devait être là pour la recevoir… À quoi bon espérer ? Pourtant, on commence à le savoir qu’il ne faut pas tirer des plans sur la comète aux Jeux, que le prévisible est bien souvent le moins probable. Cette fois encore on le vérifia. La Coréenne Kye passait nettement Filzmoser en contre arrière (tani-otoshi), mais dans le reste du tableau, cela se détraquait déjà. En effet, c’était l’Italienne Quintavalle, une ancienne -63 kg, de grande taille, droitière bien en posture, qui avait joliment contré un ko-soto-gari de l’Allemande pour waza-ari. Un peu plus tard on vit, incroyable mais vrai, la Tunisienne Jelassi surpasser le mouvement de hanche de la Cubaine Lupetey en yoko-guruma pour ippon ! Et Barbara ? Comme si de rien n’était, avec une sorte de facilité insolente, elle contrôlait avec son bras droit à l’intérieur l’épaule de la gauchère Kye, gênée, et, sonnant la charge, lui marquait un vrai beau waza-ari sur un te-guruma tout en poussée. Exploit de taille ! Kye restait sur trois médailles olympiques de suite, et quatre titres mondiaux. Enorme... La porte grande ouverte ! Pour passer en finale, il faut encore battre une Italienne dont la meilleure performance est 5e à Rio (pas mal tout de même…) et 5e aux « Europe » 2008… où elle avait justement été dominé par Barbara. Derrière ce combat, une Tunisienne (Jelassi), ou une Australienne (Pekli) à prendre pour aller en finale… Qui a dit « les doigts dans le nez » ? Restait à gérer une telle bouffée d’espoir.



-57 kg : Harel s’enferre sur Quintavalle

On comprit vite que ce ne serait pas si simple. Déterminée sans doute Barbara, mais pas complètement lucide, voire même un peu « en panique » comme l’exprima plus tard Cathy Fleury (qui se présenta aux journalistes en avouant vivre ses moments les plus difficiles en tant qu’entraîneur sur cette cruelle journée). Avec sa grande allonge, l’Italienne inquiétait la Française qui avait tendance à trop reculer et à lancer ses attaques trop près de la bordure, voire à l’extérieur, ce que sanctionna l’arbitre une première fois. Elle subissait le début de combat et la garde forte de l’Italienne qui n’en faisait pas beaucoup, à part monter fort les mains. L’Orléanaise s’employait de son mieux et finissait par faire décliner physiquement son adversaire qui était pénalisé à son tour. Mais les problèmes tactiques restèrent les mêmes et ne furent pas résolus. C’est la même sanction, sévère, qui tombait peu avant la fin du combat : shido pour sortie contre « Barbe », qui perdait là le combat le plus important de sa carrière et une occasion évidemment unique d’aller en finale des Jeux.

-57 kg : en route pour la place de trois

Toujours courageuse et positive malgré tout, Barbara Harel redonnait du plaisir à tout le clan français en battant, deuxième superbe exploit du jour, l’Allemande Boenisch, championne olympique en titre, balayée joliment dans le temps pour un petit koka. C’était repartie et plutôt bien : une adversaire difficile, la Hongroise Baczo ne résistait pas à son enchaînement balayage / yoko-tomoe-nage enfin plus mobile. Le droit d’espérer était à nouveau autorisé.DE-ASHI-BARAI DE BARBARA HAREL SUR L'ALLEMANDE BOENISCH
Dans l’autre tableau, on avait vu l’Espagnole Fernandez touchée par la revenante Néerlandaise Gravenstijn - puis coulée en repêchages par l’étonnante Brésilienne Quadros, qui allait aussi battre sur harai-goshi (et blessure au genou associée) la Japonaise Sato avant de finir sur le podium, apportant ainsi la première médaille féminine individuelle olympique de l’histoire, non seulement du judo brésilien, mais aussi de tout le sport brésilien ! On avait vu aussi l’étonnante Chinoise Xu Yuan - cheveux courts de « garçon manqué », assurance presque arrogante et étonnante tendance (pour une Chinoise) à solliciter le public à chacune de ses victoires - battre aux pénalités (et avec le concours des arbitres) une Japonaise active, Aiko Sato, puis céder aux pénalités devant Gravenstijn. Désormais s’était celle-là qui se retrouvait face à Barbara, la seule capable de l’empêcher de toucher enfin son inaccessible étoile. Et la confiance ne manquait pas chez les Français car, si la Chinoise avait parue puissante, elle avait aussi montré des limites en mobilité, en technique et en gestion tactique.

-57 kg : Xu, la terrible erreur

Confiante, Barbara attaquait d’entrée et on sentit que cela allait passer : elle engrangeait immédiatement un koka. La force de la Chinoise ne la gênait pas tant que cela. Elle parvenait à faire sauter sa saisie haute assez facilement et à l’obliger à défendre. Et puis sur une attaque plongeante au raz dans les jambes, Harel insistait, se replaçait et enroulait Xu pour waza-ari ! Il restait alors plus de trois minutes, mais on ne sentait pas la Chinoise apte à trouver des solutions pour revenir au score. C’était plié à moins… À moins de faire une erreur. Une grosse erreur. Presque euphorique, Barbara Harel lançait sa jambe gauche en travers dans un o-soto-gari parti de très loin, de trop loin, et donnait juste ce qu’il fallait à la Chinoise pour renaître. De toute sa puissance, celle-ci renvoyait la force d’où elle était venue, et finissait son o-soto-gari en contre par un ippon bien lourd. Harel pouvait se tenir la tête entre les mains, appeler de ses regards le coach, le ciel à l’aide, elle ne pouvait plus revenir en arrière.
Quelques minutes plus tard, l’Italienne lançait o-soto-gari pour waza-ari contre une Néerlandaise déjà bien contente d’être en finale et gagnait, sans bien avoir l’air de réaliser ce qu’elle venait de faire, la première médaille d’or olympique du judo féminin italien.




-73 kg : Mammadli, trop fort !
Une compétition masculine sans « Danny », non qualifié, et sans grande surprise, mise à part l’échec d’un Kanamaru vieillissant et blessé à l’épaule au premier tour, expulsé d’abord sur harai-goshi par un Iranien sur-puissant Ali Malomat, puis en repêchages par l’excellent Van Tichelt (futur 5e), qui le fixait au sol après un très beau « o-uchi-gari-gaeshi » (contre de o-uchi-gari). Dès le début du jour, deux hommes se distinguèrent par leur capacité à finir vite les combats, les finalistes mondiaux Wang Ki-Chun (KOR) et Elnur Mammadl (AZE), le premier sur des mouvements brillants de judo, le second sur des kata-guruma (et un beau seoi-nage) étourdissants de puissance et de précision. Mais sur le Brésilien Leandro Guilhero, au second tour, le Coréen se blessait à une côte et c’est l’ombre de lui-même qu’il parvenait jusqu’en finale. L’affaire ne traîna pas : dès la première prise de garde, Mammadli le jetait sur le dos en attrapant son pantalon. Après la première manche (les « mondes » à Rio), la revanche aujourd’hui. La belle sans doute bientôt. Sur le podium avec eux, l’excellent Rasul Boqiev, un Tadjik plutôt rude mais assez judo quand même (qui amène la première médaille olympique tadjik de l’histoire) et le bon Brésilien Guilhero, qui réédite son exploit d’il y a quatre ans, faisant son unique éclat du jour avec un magnifique sode acrobatique contre l’Iranien pour la place de trois.MAMMADLI PROJÈTE WANG EN FINALE