dimanche, août 10, 2008

10 août 2008

-52 kg : Défaite d’entrée pour Audrey La Rizza / la Chinoise Xian Dongmei domine la Coréenne du Nord An Kum-Ae en finale
-60 kg : Benjamin Darbelet vice champion olympique ! / Le Japonais Uchishiba emporte l’or


-52 kg : Game is over…
Il fallait être bien tout de suite. Dans le bain chinois. Entrer dans ces Jeux, les premiers d’Audrey La Rizza, en prenant la mesure d’une référence de la génération précédente, la Belge Heylen. Battre la meilleure Européenne en 2004, qui c’était faite de plus en plus discrète depuis deux ans, cela aurait été un très bon signe pour la suite de cette compétition, comme une passation de pouvoir… D’autant que derrière, l’Australienne Ryder n’aurait pas pesé lourd et qu’un quart de finale contre la jeune Misato Nakamura était vraiment dans les cordes d’Audrey, qui aime bien les techniciennes japonaises. Oui, mais voilà… C’est l’expérience qui parvint cette fois encore à tempérer, à contrôler la fougue. Sans être vraiment en danger, la Française ne parvint pas à emballer les débats, laissant les choses s’installer dans un faux rythme, un tête à tête qui convenait bien à Heylen dont une main traînait toujours en quête d’un pantalon à accrocher. Le combat s’échappait, sans que la Belge ne fasse grand chose pour inquiéter Audrey. Au golden score, la Française fait l’erreur : en se dégageant d’une saisie, elle recule de quelques pas… Aussitôt Ilse Heylen sent l’ouverture fatidique, saisit la jambe au niveau du genou, glisse son pied en barrage derrière les talons d’Audrey, qui doit concéder le koka.
Comme prévu, l’Australienne fut balayée sur un très joli de-ashi-barai. Mais c’est Nakamura qui sortit victorieuse d’un combat qui ressembla au premier d’Heylen, mais dans lequel la Japonaise sût mettre plus d’activité que la Française et prendre pour elle le koka victorieux. Game is over, pour cette fois, pour Audrey La Rizza. LA RIZZA ATTAQUE HEYLEN EN ETRANGLEMENT


-52 kg : Xian, le doublé !

L’ancienne -48 kg japonaise Misato Nakamura eut un tableau plutôt consistant jusqu’en demi-finale, avec deux combattantes européennes, l’Allemande Tarangul et la Belge Heylen, qui l’obligèrent à faire face physiquement. Cela devint carrément indigeste en demi face à la Nord-Coréenne, si formidablement physique que la Japonaise, encore jeune, et manifestement très en dessous à ce niveau, était pliée en deux ou à plat ventre à chaque fois que son adversaire posait ses mains. Mais valeureuse, elle insistait en techniques de jambe, son arme maîtresse et perdait d’un simple shido pour « bras tendus ». En place de trois, c’était plus facile face à une Asiatique « normal », la Coréenne du Sud Kim, qui subissait son ko-soto-gari pour ippon. Une Coréenne du Nord en finale donc, et face à la combattante attendue de tout le pays, la championne olympique Xian Dongmei. Une vraie tornade toute la journée face, sans doute, aux meilleures du moment. La championne d’Europe espagnole Carrascosa fit quelques secondes, très puissamment et habilement contrée en ura-nage sur une tentative de ko-soto-gake. Monteiro elle-même, la plus dure de ses adversaires potentiels, la vice championne du monde portugaise, dût rendre les armes dans une véritable guerre, non sans avoir tiré la première en marquant sur kata-guruma. Mais elle subissait finalement un ippon magnifique en contre, uchi-mata dans une attaque en sukui-nage. Autre partie de bras de fer contre la meilleure Africaine cette fois, la très forte Algérienne Haddad. C’est sur un étonnant mouvement d’épaule « rouleau compresseur », dans lequel elle se met complètement en travers pour enrouler l’adversaire (uchi-makikomi pour les puristes) qu’elle entraînait sur le dos cette sérieuse rivale. La finale fut moins fulgurante, mais c’est elle qui finissait, comme c’était logique, par dominer la Coréenne du Nord d’un yuko. Triomphe chinois pour Xian Dongmei qui devient ainsi la seconde féminine à faire le doublé olympique. Joli moment du jour, Haddad ne décevait pas en allant elle aussi chercher sa récompense historique : la première médaille olympique algérienne du judo !XIAN DONGMEI CHAMPIONNE OLYMPIQUE


-66 kg : Darbelet enfin récompensé !

On l’avait « reniflé » ce bon tableau qui pouvait l’amener en demi-finale : un Marocain inconnu, Rashid Rguig, qu’il prit à son rythme, marquant finalement deux petit koka d’abord sur te-guruma puis sur o-uchi-gari avant de conclure dans les dernières secondes sur juji-gatame. Ensuite une vieille connaissance qui n’avait plus le bénéfice de la surprise, le Canadien Sasha Mehmedovic qui l’avait battu assez nettement aux derniers championnats du monde. Il eut un peu de mal, fut assez prudent, mais finit par le contrer pour un koka précieux dans les dernières secondes du combat. Enfin, le Russe Gadanov. Ce combattant entre aperçu pour la première fois en 2005, en pleine progression depuis 2007, a fait 3e à Paris et aux « Europe ». Il démarre lentement, mais met du rythme jusqu’au bout, ce qui lui permit de dominer en début de journée l’Azéri Salimov (qui lui avait pourtant marqué waz-ari) et le Hongrois Ungvari, battu un peu injustement d’une pénalité dans les dernières secondes, alors qu’il avait mené une bonne part du combat par deux koka. L’affrontement fut indécis pendant plusieurs minutes, Darbelet contrôlant plutôt bien son adversaire. Mais encore un peu lent, il écopa d’un shido inquiétant. À 30 secondes de la fin, dans une belle rotation, il plaçait son o-uchi-gari. Fini ? Non car il commettait l’erreur tactique d’être trop nettement défensif et se voyait infliger un deuxième shido ! Pas déstabilisé le Français : dans les dix premières secondes de la prolongation, il plaçait ses mains sous les bras de son adversaire et l’attirait à lui pour un énorme o-uchi-gari. Demi-finaliste ! Face à qui ? Un Coréen du Nord bien rugueux et plutôt bon, dont on pressentait pourtant qu’il ne serait peut-être pas l’adversaire le plus dur du jour pour Darbelet, qui aime les combattants physiques. De fait, il réalisa assez vite que ce serait facile, car au bout d’une minute, il passa à la vitesse supérieure, livrant son combat le plus plein et le plus confiant, démontrant aussi encore une fois une gamme technique souvent sous-estimée. Il marquait en effet un waza-ari magnifique sur un enchaînement d’école o-soto-gari / nidan-ko-soto-gari et un second un peu plus tard sur harai-goshi-gaeshi. Et il était en finale ! Avec cette fois un autre genre d’adversaire, de ceux qu’ils apprécient un peu moins, un technicien expert, le Japonais Uchishiba. Celui-ci avait battu, à chaque fois sur le même registre très fluide, mouvant et usant, l’Iranien Miraesmaeili, le surprenant Ouzbek Shapirov, et le finaliste des derniers championnats du monde, le Cubain Arencibia. Sans être très tranchant, il avait su jouer sur les qualités de base du judo japonais et prendre sa chance. Il partait sans doute avec un a priori favorable sur la finale, mais tout paraissait possible pour Darbelet, qui avait haussé le volume toute la journée. Frustrante finale… Car elle n’eut pas vraiment lieu. Après deux, trois escarmouches dans la première minute où les deux hommes furent chacun dans leur logique - le Français essayant de mettre la main sur le Japonais qui ne le laissait pas faire et ripostait par des petites techniques de jambe – Uchishiba prenait l’initiative d’attaquer soudain Darbelet en étranglement alors que celui-ci était un genou au sol. Le Français se redressait, aussitôt attaqué en ko-soto-gake par me Japonais, Darbelet contrait le mouvement en rotation, jetant vigoureusement son adversaire sur le dos et tombant dans le même mouvement lourdement sur le front. Tout se passe en une seconde et l’arbitre ne bronche pas, d’autant que l’action continue de s’enchaîner rapidement. À moitié assommé et douloureux au niveau des cervicales, confus et pensant un instant avoir marqué ippon, « Darbe » laisse le Japonais le retourner et saisir très rapidement l’opportunité d’un osae-komi, immédiatement suivi d’un ude-gatame sur son bras tendu. Pris, surpris, assailli par la douleur à la tête, au cou et au bras, Benjamin tape… pour se redresser quelques minutes plus tard, déçu, et médaille d’argent pour l’éternité des Jeux olympiques 2008.
Sans vraiment marquer sa génération, sans enchanter la foule, mais avec une sacrée constance et en sachant se concentrer sur ses objectifs et réaliser ses rêves, le sympathique et habile petit judoka japonais Masatoshi Uchishiba entre dans l’histoire. Lui qui avait failli abandonner sa carrière quatre ans plus tôt pour insuffisance de résultat – pré-retraité des- 60 kg qu’il était, avant d’être incité par l’encadrement nippon à tenter sa chance dans la catégorie supérieure à quelques mois des Jeux d’Athènes, est désormais le sixième champion de l’histoire du judo (le septième en ajoutant la performance chez les féminines de Tamura) à gagner deux fois un titre olympique. Chapeau bas à Masatoshi Uchishiba.UCHISHIBA ET DARBELET EN FINALE